Mickaël.

Non non tu n'as pas à te sentir gênée. Les mères qui meurent ça arrive tous les jours tu sais. J'ai pas besoin qu'on me dorlote, qu'on me mette la main à l'épaule et tout ça. Ca va. J'ai grandi... J'ai grandi. Je suis équilibré tu sais. Maintenant. Je mange mes cinq fruits et légumes par jour. Je fais du sport. Je regarde des vieux films en noir et blanc, et je me douche matin et soir. Alors c'est pour dire... Non ne me regarde pas avec ces yeux-là. Ceux qui disent oh le pauvre, le pauve... Regarde-moi comme avant avec moquerie et dédain. Pique et cherche. Insulte-moi de doux noms d'oiseaux. Et continue de ne pas me contredire quand je me trouve nul ou bête. Ou les deux. Et continue de m'ignorer quand je te regarde à m'en brûler la rétine, dans un coin sombre de la pièce. Ne m'aime pas tout à coup parce que tu me découvres bancale. Ou parce que tu te sens coupable de ne pas avoir été plus douce avec moi. Tu n'es pas coupable. Des gens qui meurent ça arrive tous les jours, et ça sans même que tu es levé le petit doigt. Alors tu vois... Je n'ai pas besoin de "désolé", "pardon", ou même de "courage". On s'en fout. Je ne me sens pas plus beau, plus drôle ou plus intelligent d'avoir mangé des biscuits apéritif à tous les repas sa première semaine d'internement. On ne se sent pas plus fort quand a connu le frigo vide et la gorge serrée. C'est pas vrai. Alors fais pas comme si soudain tu me regardais vraiment avec tes deux yeux. Comme si j'étais quelque chose qui avait de l'intérêt. Qui existait. S'il te plaît... Les mères qui meurent ça arrivent tous les jours, moi c'était il y a longtemps, alors si tu pouvais faire comme si de rien n'était... S'il te plaît.